Lu pour vous
Geo Histoire : Le nazisme 11,80€ en librairie avec le DVD.
Cet excellent magazine nous gratifie d'un numéro sur les racines du nazisme et nous explique la montée en puissance d'une idéologie dévastatrice. De 1871 à 1933, il décortique les mécanismes qui portèrent Hitler au pouvoir.
Pédagogique, instructif et passionnant, il est aussi un excellent rappel du passé pour éviter toute déconvenue future....
Camille SENON : Survivante du tramway d'Oradour-sur-Glane(*)
On rencontre souvent dans toutes les manifestations Camille SENON, - 89 ans -, inséparable de son chapeau, comme la reine d'Angleterre avec les siens (de chapeaux) ; elle vient de confier ses souvenirs à Guy Perlier.
Je recommande l'humour décapant de ce dernier, qui, dans son introduction décrit une séance de remise collective de palmes académiques.
Camille est, comme le souligne le titre de l'ouvrage, une rescapée du massacre, un peu par hasard. Sa famille était originaire d'Oradour sur Glane et habitait un village voisin ; quant à elle, elle logeait pendant la semaine à Limoges où elle travaillait ; la fin de semaine venue, elle rentrait chez ses parents par le dernier tramway. Elle fit donc partie des voyageurs qui aperçurent l'incendie sur Oradour et, le tram ayant été stoppé par les soldats « boches », elle a été relâchée car elle ne résidait pas dans le bourg proprement dit d'Oradour, mais à l'écart. Elle est donc sortie vivante «miraculeusement » de cette tragédie, mais elle y a perdu son père et une partie de sa famille, oncle et cousin(e)s etc.
Hébergée à Limoges dans un foyer pour jeunes travailleuses intitulé « Protection de la jeune fille », elle eut droit à son retour après la tragédie à cette oraison funèbre de la directrice, une espèce de duègne pétainiste et calotine, « soyez heureuse que votre père soit mort de cette façon plutôt que s'il avait rejoint les terroristes dans le maquis ».
Camille SENON a assisté à la libération de Limoges le 21 août 1944. Puis à fin 1945, elle s'est présentée à un concours national de recrutement aux PTT. Reçue, elle a entamé, le 1er janvier 1947 à Strasbourg, une carrière qui s'est achevée en 1983.
En Alsace, sa qualité de rescapée d'Oradour la fit connaître des milieu liés à la Résistance et, déjà membre de la CGT à Limoges avant de passer son concours, elle fut vite repérée par les appareils de la Fédération des PTT comme une militante pleine d'avenir. De ce fait, elle a vécu non isolée avec sa mère dans une terre « étrangère » [Si je me permets d'utiliser ce terme, c'est parce que je suis originaire par ma mère d'une famille strasbourgeoise qui a « opté » pour la France après 1870].
En 1950, par mutation, elle devint parisienne et déléguée syndicale aux chèques postaux, une des concentrations de travailleuses la plus nombreuse. Ensuite après les grèves d'août 1953, elle adhéra au Parti communiste. Elle devint permanente en 1966, et première femme à être secrétaire générale d'un syndicat. Elle vécut toutes les péripéties liées à la guerre d'Algérie, à la tragédie de Charonne (où une de ses collègues mourut tragiquement) et aux évènements de 1968.
Camille SENON a connu une riche existence, où les tragédies ont côtoyé les joies dont celle d'avoir vécu avec une mère centenaire ; elle nous l'a fait découvrir avec le concours avisé de Guy Perlier.
(*) par Guy PERLIER : Camille Senon, Survivante du tramway d'Oradour-sur-Glane. 210 pages (dont 22 illustrées de photos), octobre 2013, 19 € Editions les Monédières.
François MAIREY-ROUVELOUP
LA NUEVE 24 août 1944
Si vous voulez savoir ce que ces REPUBLICAINS ET ANARCHISTES ESPAGNOLS, écrasés par le coup d'état militaire du 18 juillet 1936 et chassés de leur pays par le Franquisme, ont pu apporter dès 1943 au combat français et à la Libération de la France, lisez l'ouvrage que vient
d'écrire Evelyn MESQUIDA, sous l'intitulé - LA NUEVE 24 août 1944-préfacé par Jorge SEMPRUN et postfacé par le Général Michel ROQUEJOFFRE . Editions du Cherche Midi-18,00€.
C'est l'aventure méconnue de ces Républicains et Anarchistes Espagnols qui avaient moins de 20 ans en 1936, évadés des camps de concentrations dans lesquels le régime de VICHY les avait internés en France.
Ces Républicains et Anarchistes Espagnols ont rejoint dans le désert Lybien le capitaine Philippe de HAUTECLOQUE devenu le général LECLERC « héritier d'une tradition militaire et d'une éducation conservatrice catholique et traditionnaliste »
Ensemble, ils sont devenus des « COMBATTANTS DE LA LIBERTE » et lors de la libération de Paris en août 1944, ce sont les républicains et anarchistes espagnols de la 2ième D.B. qui entouraient le général LECLERC.
« Les véhicules de la Division LECLERC, devant l'Hôtel de Ville de Paris, étaient conduits par des espagnols » s'écriait le speaker de la radio française.
Peu de temps après la Libération, les autorités gaullistes et les dirigeants du Parti Communiste Français contribuèrent à faire le silence sur les étrangers et notamment sur les combattants de la NUEVE qui avaient lutté aux cotés des combattants français pour libérer la France. Après 65 ans de silence organisé, ce livre rétablit la vérité historique.
Le travail de recherches mené à bien par Evelyn MESQUIDA est dans la droite ligne du message lancé par Georges GUINGOUIN dans son discours du 6 septembre 1981 de Saint Léonard de Noblat : « soyez hommes et femmes de vérité » et dans son ouvrage intitulé « DES MYTHES ET DES HOMMES »
« Devenir un être humain responsable commence par le souci de la vérité historique. La connaissance exacte du passé permettra d'agir sur le devenir »
C'est bien ce que notre Vice-Présidente Michèle GUINGOUIN nous rappelle (bulletin no 86 année 2011 page 3) "résister aujourd'hui... contre l'oubli et les falsifications, la réécriture de l'Histoire comme nous le faisons dans ces colonnes depuis la création de l'association rechercher et mettre en lumière la vérité »
Bruno-Marie LARDEAU
DIMANCHE FATAL AUX GLIERES - 26 mars 1944
La « bataille « du Plateau des Glières est un mythe érigé en symbole d’une Résistance héroïque face à la barbarie nazie.
Le Plateau des Glières a certes été l’objet d’attaques et de pilonnages par l’artillerie et l’aviation, mais la bataille s’est bornée à un accrochage qui s’est déroulé le 26 mars 1944, dans un lieu-dit Monthiévet opposant un groupe d’éclaireurs allemands à quelques maquisards.
Dans l’échange de quelques rafales un maquisard fut tué et un autre gravement blessé.
Cette anicroche conduisit le commandant du maquis, éloigné et mal informé à ordonner le décrochage. L’affaire des Glières n’est donc pas une grande victoire sur le terrain, mais un peu comme Valmy, elle est une victoire stratégique déterminante pour la suite de la guerre.
Le « corps d’armée » constitué sur le plateau a donné lieu à une opération d’intoxication médiatique. L’opération est décrite par des communiqués de radio Londres, de radio Sottens (Suisse) et même radio Moscou. De l’autre côté, le collaborateur Henriot tonne à radio Vichy contre les « judéo-communistes », et Darnand , Chef de la Milice, « veut régler cette affaire entre Français ». Enfin cette affaire permet à De Gaulle de montrer aux Américains qu’il existe une résistance sur le terrain.
L’exploitation médiatique des Glières n’est pas terminée, puisque le filon est exploité par Nicolas Sarkozy qui s’y est rendu le 4 mai 2007, deux jours avant le second tour des élections présidentielles. Il a semblé en vouloir faire sa « Roche de Solutré » ; il y est même retourné à l’improviste le 18 mars 2008.
Les deux auteurs hauts savoyards de l’ouvrage, ont voulu rétablir la réalité historique. L’un, né en 1927, Robert Amoudruz, est originaire d’une famille de cheminot communiste et il est l’auteur de plusieurs ouvrages consacrés à la Résistance de sa Région. L’autre, Jean-Pierre Carrier, né en 1942, est le fils de l’un des chefs de la Résistance haute savoyarde, fait Compagnon de la Libération, brûlé vif dans sa maison par les Allemands qui l’avait investie ; depuis 2000, il s’est spécialisé dans des enquêtes sur la Résistance en consultant les archives Nationales et celles de l’Armée à Vincennes.
Dans le but d’aboutir au présent ouvrage, afin de rétablir (voire d’établir) la vérité historique sur l’affaire des Glières, les auteurs, accompagnés de rares survivants, se sont livrés en 2004 à une sorte d’archéologie militaire, sur la clairière de Monthiévet, théâtre de l’anicroche évoquée plus haut.
On s’en doute, cet ouvrage, - qui en outre replace l’affaire au plan national parmi tous les courants (quatre sont nommés : « gaulliste », « communiste », « britannique » et « giraudiste ») intervenants dans la Résistance -, dérange les idées reçues.
par Robert AMOUDRUZ et Jean-Claude CARRIER, 382 pages, avril 2011 .Editions Cabédita
François MAIREY-ROUVELOUP
CHAMBERET : Un village de Corrèze dans la terreur
Henri NANOT (1951-1962) est un poète-paysan victime des geôles de la IVème République, dont le fils, Jean-Jacques, perpétue, avec honneur, la mémoire.
Le fils et la petite-fille ont oeuvré à la publication de ce livre, dont le manuscrit, remontant à 1957, n'avait jamais été publié du vivant de son auteur. Henri NANOT, ancien résistant ayant participé à l'épopée du maquis de Georges Guingouin, s'était fixé comme objectif, de réhabiliter ses camarades de Résistance salis par les ignominieuses accusations lancées par les anciens collabos ou planqués de la Guerre, devenus les chantres de la SFIO, couvrant la torture en Algérie.
« Un village de Corrèze dans la terreur » retrace les sombres affaires de Chamberet à partir desquelles on voulut compromette Geroges Guingouin au point qu'il faillit en mourir en février 1954, tabassé en prison.
Henri NANOT, dont le sort fait penser à celui d'Antonin Artaud, avait connu le chantre du surréalisme, André Breton qui l'avait encouragé.
Quant à ce livre, préfacé par le petit-fils d'un toubib que l'auteur avait connu dans le maquis, baptisé du nom de Farigoule, son style est lyrique autant que décousu : nous découvrons une kyrielle de noms de fantaisie qui dissimulent des personnages aussi "honorables" que le normalien de Jean Le Bail.
Nous nous trouvons en face d'un ouvrage attachant empreint de poésie rurale.
Henri NANOT : CHAMBERET , Un village de terreur.Préface de Jean-René JUGE 270 pages (dont 44 illustrées de photos), mai 2013, 25 € Editions Mai
François MAIREY-ROUVELOUP
HISTOIRE D’UN ALLEMAND DE L’EST
L’Allemand en question est l’auteur de l’ouvrage, Maxim Leo, né à la charnière des années 60 et 70 à Berlin Est, comme on disait jusqu’à novembre 1989. Sa mère, qu’il appelle Anne, est née en 1947, son père qu’il désigne sous le nom de Wolf est né en 1942. L’une est membre du Parti, l’autre ne l’est pas. Maxim est journaliste ; autour de 2007 il a décidé de raconter la saga de sa famille, avec une approche sociologique et politique, en essayant de recueillir des témoignages d’anciens combattants de la dernière guerre mondiale encore vivants, que sont ses deux grands-pères, Werner, sous-officier dans la wehrmacht, (29.11.13/30.12.08), et Gerhard , lieutenant FFI, (8.06.23/14.09.09). Ces deux personnages ont en commun d’avoir été en France pendant la guerre et d’avoir vécu après celle-ci en RDA sans jamais se rencontrer tout deux étant membres du SED (Sozialistiche Einheitspartei Deutschlands), c’est-à-dire du parti unique communiste.
Là s’arrêtent leurs points communs.
Werner, d’origine paysanne, est devenu ouvrier. Occupant un poste jugé indispensable dans une usine métallurgique, il n’est incorporé que le 9 septembre 1944 pour être envoyé sur le « Front de l’Ouest » c’est-à-dire en France. Fait prisonnier de guerre, il travaillera dans une ferme mancelle jusqu’à septembre 1947. Auparavant il a été un membre « lambda » du parti nazi et a participé à la kermesse gymnique lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques à Berlin en 1936. Il s’est marié en 1941 avec la grand-mère de Maxim et a divorcé dix ans plus tard.
Gerhard est issu d’une famille comportant des médecins ou des avocats d’origine juive devenue protestante au début du XXème sièclt. Le père de Gerhard, Wilhelm est avocat spécialiste en droit international (pendant ses études il aurait rencontré en Suisse un certain Oulianov). En novembre 1927, il défend un général français en retraite accusé par un inconnu, nommé Joseph Goebbels d’être à l’origine de son pied-bot à cause de tortures. Le père de Gerhard n’a aucune peine à gagner le procès en établissant la preuve que le pied-bot a une origine congénitale. Mais en février 1933, l’inconnu étant devenu ministre à la Propagande, il sera arrêté et envoyé en camp de concentration ; libéré au cours de l’été on lui enlève son passeport, ce qui le conduira à émigrer clandestinement avec sa famille pour ouvrir une petite librairie allemande à Paris dans le quartier de la République.
Au moment de la débâcle de 1940, Gerhard rejoint le sud de la France et il se retrouvera, - alors que son père a été déporté au camp de Gurs d’où il s’échappera -, dans la région de Toulouse sous une identité d’emprunt, Gérard Laban ; son histoire est connue par un livre, « un train pour Toulouse » paru en 1997. Entré dans les services allemands comme interprète, il sera arrêté ; au cours d’un transfert en train de Toulouse à Paris pour y être jugé, le train sera arrêté à Allassac en Corrèze, le 3 juin par des partisans FTP ; son libérateur, un certain Michel, avec qui il participe à la prise de Tulle le 6 juin, fut pris 3 jours plus tard par les allemands qui le pendront à Uzerche à un réverbère en face d’une maison où le général Lammerling a pris ses quartiers...
Le livre de Maxim Leo n’est pas seulement une saga familiale. C’est aussi la saga de la DDR (Deutsche Demokratische Republik). Il a pu avoir accès à l’envers du décor en consultant les archives de la Stasi ; il pu se faire une autre idée de son grand-père : Gerhard bien que membre de la nomenklatura était surveillé ; s’il faisait preuve sur le plan familial de positions tout à fait « staliniennes », il critiquait en interne certains points de la ligne du Parti.
Par le même canal, il put examiner des rapports sur le comportement politique de ses parents. Et sa mère, dans le cadre de recherches historiques, apprit un secret de famille : son propre grand-père juif, habitant Dusseldorf où elle est née, mort à Auschwitz en 1943, était membre d’un groupe oppositionnel à la ligne du parti communiste allemand dans les années 20, groupe toléré jusqu’à un congrès de Moscou en 1928, instituant la bolchevisation du Parti et déclarant que les « sociaux-démocrates étaient aussi dangereux et malveillants que les fascistes ».
Par Maxim LEO, 304 pages, Editions Actes Sud 10/ 2010 - 22,80 €
François MAIREY-ROUVELOUP
LE CLOS DU MARECHAL PETAIN
Au printemps 1942, le Préfet régional de Vichy suggère aux notables de la ville de Beaune d’offrir un clos au Maréchal Pétain. En bon maréchaliste(1), le maire de la capitale du vin de Bourgogne, (12 000 habitants entre les 2 guerres, 10 000 de plus maintenant), s’empresse de donner suite.
Comme ce maire est aussi Président du Conseil d’Administration des Hospices, propriétaires d’un domaine viticole exceptionnel, il décide qu’une parcelle de 51 ares et 10 centiares, dénommée Beaune les Teurons, sera offerte par un dû acte notarié au Maréchal. En compensation, les Hospices pourront acheter une parcelle, jouxtant jusque là leur domaine, d’une surface de 92 ares et 10 centiares.
Le 29 mai 1942, une délégation de huit personnes emmenée par le Préfet, le Maire et deux anciens députés élus en 1936(2) est reçue par le Maréchal auquel elle remet le titre de propriété et une « clef de la vigne » qui porte le nom de Clos du Maréchal. Le Maréchal remercie et fait part de son désir qu’à sa mort, - il a alors 86 ans -, la vigne revienne aux Hospices de Beaune… Ce fut confirmé par un testament(3) particulier signé le 21 juin 1942.
Le maire s’appelle Roger Duchet ; maintenu par Vichy, il a été élu pour la première fois en 1932 sous l’étiquette radicale-socialiste, il le restera jusqu’à 1965 sous l’étiquette CNI (Centre National des Indépendants) qu’il a créée en 1949 avec René Coty. Seul incident de parcours, il fut destitué le 9 septembre 1944 sous l’autorité de mon père(4), mais réélu triomphalement en mai 1945. Après la guerre, il devint aussi sénateur et ministre(5).
Le clos du Maréchal, étant enclavé dans d’autres parcelles des hospices, la municipalité construisit une route et il fallut élever une clôture et établir un bornage. Un an plus tard, une cérémonie fut organisée le 25 mai 1943 pour inaugurer trois bornes de 1,20 m de haut ornées de francisques et une grille munie d’étoiles évoquant celles de sa dignité militaire.
La publicité autour de ce clos facilita également les affaires vinicoles avec l’occupant ; en 1943 on célébra en grande pompe l’anniversaire des 500 ans de la fondation des Hospices de Beaune et la vente annuelle put avoir lieu, la première depuis le début de la guerre. Cette vente annuelle qui, en novembre 2012, fut présidée par celle ayant été première dame de France jusqu’à mai dernier…
par Jean VIGREUX(6), 162 pages, octobre 2012 .
Presses Universitaire de France ; 17 €
(1) Dans une note à la page 28, notre ami Pascal Plas est cité pour sa contribution « Elites et édiles : le poids des réseaux » à un ouvrage collectif de Gilles Le Béguec et Denis Peschanski paru en 2000 aux éditions du CNRS sous le titre « Les élites locales dans la tourmente. Du Front populaire aux années cinquante ».
(2) L’un, un comte, élu dans mon arrondissement de naissance, Montbard, sous l’étiquette « candidat contre le collectivisme », l’autre élu à Saint-Jean-de-Losne, dirigeant du Parti agraire et paysan français, devint en janvier 1944 commissaire à l’agriculture dans le dernier gouvernement Laval.
(3) Testament auquel il n’a pas été donné suite : le Clos du Maréchal, - qui n’a jamais cessé d’être entretenu par les Hospices de Beaune -, a été mis sous séquestre le 21 septembre 1944, puis confié aux Domaines après que les biens du maréchal lui aient été confisqués au moment de son procès ; enfin la propriété du Clos sera rendue aux Hospices par un jugement du tribunal civil du 31 juillet 1946, non sans que ceux-ci dussent rembourser une somme de 365 200 F au département.
(4) Mon père assurait alors l’intérim du Commissaire de la République désigné, Jean Bouhey, grièvement blessé, élu en 1936 député au terme d’une élection où il avait devancé au premier tour un candidat radical ayant recueilli 20 % des voix, le maire de Beaune Roger Duchet ; ce dernierl dut se désister de fort mauvaise grâce sur ordre de son parti. Jean Bouhey fut le seul député socialiste à voter contre les accords de Munich en 1938.
(5) Ministre depuis 1951, Roger Duchet fut fort marri, dit-on, de n’être pas reconduit comme ministre en juin 1953 par son collègue de Parti, Joseph Laniel qui avait voté les pleins pouvoirs au Maréchal en 1940 et devint néanmoins membre du CNR (Conseil National de la Résistance). Aussi en tant que secrétaire général du CNIP, (le CNI est devenu en 1951 le Centre National des Indépendants ET Paysans), Roger Duchetl fit manquer quelques voix à Joseph Laniel pour devenir Président de la République et favorisa l’élection au 13ème tour de René Coty, à l’avant-veille de Noël 1953, afin d’éviter l’élection d’un socialiste Marcel-Edmond Naegelen, un prédécesseur de Robert Lacoste comme gouverneur général de l’Algérie.
(6) Jean Vigreux, professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Bourgogne, est aussi l’auteur d’un « Que Sais-je » consacré au « Front Populaire » et d’une biographie de Waldeck-Rochet.
François MAIREY-ROUVELOUP
Dictionnaire amoureux de la Résistance
Gilles Perrault, aujourd'hui âgé de 83 ans, et auteur de beaucoup d'ouvrages dont les plus connus sont l'Orchestre Rouge et notre ami le Roi, nous livre avec ce dictionnaire amoureux de la Résistance, un ouvrage plaisant à lire.
Le titre étonne mais répond à l'esprit d'une collection de 80 dictionnaires amoureux sur les sujets les plus variés, autant qu'en sont variés les auteurs.
Cette formule autorise une liberté et une fantaisie pour traiter de questions ou de personnages liées à la Résistance, avec la seule obligation de traiter les sujets par entrée alphabétique.
Beaucoup de personnages sont oubliés ; beaucoup d'autres n'ont pas droit à des entrées. Certains sont évoqués dans le cas d'un autre personnage ou d'une autre question. Ainsi Charles Tillon est-il évoqué à propos d'appels divers dont le plus célèbre est évidemment celui du 18 juin.
Georges Guingouin, lui, a droit à une entrée, à une courte biographie de sept pages et à son portrait dessiné ainsi qu'une référence à notre association et notre bulletin. Gilles Perrault nous apprend ainsi que l'un des deux juges d'instruction qui s'occupèrent de son affaire en 1953, dont il faillit mourir, avait siégé dans un tribunal militaire qui l'avait, à deux reprises, condamné aux travaux forcés pour faits de résistance.
Gilles Perrault rappelle aussi l'existence de Jean Le Bail qui qualifiait la Résistance de « farce grotesque ». Il évoque aussi Léon Bétoulle, réinstallé maire en 1947 après avoir voté les pleins pouvoirs à Vichy. Ce sujet redevient à la mode...
par Gilles PERRAULT : Dictionnaire amoureux de la Résistance 512 pages (dont 93 illustrées de dessins), mars 2014, 22 € Editions Plon-Fayard – Collection Dictionnaire amoureux
François MAIREY-ROUVELOUP
L’HISTOIRE CONTEMPORAINE TOUJOURS SOUS INFLUENCE
Cet ouvrage est une nouvelle parution mise à jour et augmentée (la précédente édition – dont nous avons rendu compte en 2004 dans le bulletin n° 66 - comportait 120 pages alors que celle-ci en comprend plus du double dont 53 pages de notes au nombre de 332).
Annie Lacroix-Riz se fixe comme mission d’étudier l’histoire à partir d’un examen détaillé de sources et des archives dont certaines, - pour la période 1935-1945 -, ne sont consultables que depuis une quinzaine d’années.
Elle explique comment l’Université française enseigne une histoire européiste ; on fait grand cas de « pères de l’Europe » comme Jean Monnet qui avait l’oreille de Roosevelt comme anti-gaulliste ou comme Robert Schuman, encore inéligible en septembre 1945 parce qu’il avait voté les pleins pouvoirs à Pétain et avait été un moment son sous-secrétaire d’état aux réfugiés du régime.
Tous les industriels et banquiers confient à des historiens le soin d’écrire leur histoire sur le mode hagiographique en gommant toutes les collusions avec les autorités allemandes avant 1939 et pendant la guerre.
L’opération visant à blanchir et à réhabiliter Renault, partant de décisions juridiques où des tribunaux de Limoges se sont distingués, entre dans cette catégorie.
Il est malvenu de dire que Robert Lacoste avant ses exploits en Algérie avait été un syndicaliste synarque avant la guerre.
Au reste pour les historiens actuels, la synarchie(1) n’a jamais existé : elle est le fruit de l’invention conspirationniste de « marxistes paranoïaques ». De même pour l’Histoire telle qu’on l’enseigne maintenant, le concept de « collaboration économique « est caduque et relève d’une taxinomie d’époque.
A propos de l’affaire Touvier, Annie Lacroix-Riz rappelle la responsabilité de l’église, -jusqu’à son niveau le plus élevé au Vatican et en France -, qui a contribué au sauvetage et à la mise à l’abri de nombreux nazis ou collaborateurs.
Ainsi, elle cite l’exemple de ce natif de Saint-Junien, ancien lieutenant de la LVF, condamné à mort par contumace le 31 juillet 1945 par la cour de Justice de Limoges, qui trouva refuge auprès d’un établissement d’enseignement agricole Saint-François-Xavier basé à Gradignan patronné par un Couvent de Franciscains situé à Bordeaux.
par Annie LACROIX-RIZ, 266 pages, septembre 2012 .
Editions Delga & Le temps des Cerises ; 12 €
(1) La synarchie est définie par wikipédia comme « une société secrète politique, réelle ou supposée, évoquée en France dans les années 1930-1940 ». On remarquera l’ambiguïté de la formulation, la synarchie est soit réelle soit supposée : le terme supposée est là pour répondre aux critères normatifs de l’Histoire officielle alors que deux ouvrages d’Annie Lacroix-Riz parus chez Armand Colin en 2006 et 2008 apportent des preuves abondantes de l’existence et de l’influence de la synarchie. (« LE CHOIX DE LA DEFAITE, les élites françaises dans les années 1930 » 672 pages et « De MUNICH à VICHY, l’assassinat de la Troisième République 1938-1940 » 408 pages)
François MAIREY-ROUVELOUP